Agenda des évènements
Prochain rendez-vous :
Agenda :
Mars
2024
  • LUN
  • MAR
  • MER
  • JEU
  • VEN
  • SAM
  • DIM
  •  
  •  
  •  
  •  
  • 1
  • 2
  • 3
  • 4
  • 5
  • 6
  • 7
  • 8
  • 9
  • 10
  • 11
  • 12
  • 13
  • 14
  • 15
  • 16
  • 17
  • 18
  • 19
  • 20
  • 21
  • 22
  • 23
  • 24
  • 25
  • 26
  • 27
  • 28
  • 29
  • 30
  • 31
 
Contact
Pour toutes vos questions, contactez-nous :
Contact
Par téléphone :
Par courrier :
21, rue Ronsard
91470 Limours
Par mail :
Contact pour adhésion et assurance :
Par formulaire de contact :
En cliquant ICI ou sur l'oreille !
Partenaires

Associations :

Fabriquants :

De l’audition normale à l’implantation cochléaire

 Intervention de Lucien Groux présentée avec l’aide de Alain Daluzeau

 

Bonjour à toutes et à  tous.

Je n’ai pas l’habitude de m’exprimer en public donc il y aura quelques petites hésitations de ma part, je vous demande de bien vouloir m’en excuser. Alain a gentiment accepté de lire ce texte car les projecteurs reflèteront sur ma loupe.

 

La vue

La vue fait partie intégrante du contexte de mon intervention. Je suis pratiquement aveugle de naissance. Cataracte congénitale bilatérale. Vers 4 ans je ne voyais plus rien. Après la guerre de 39-45, j’ai subi l’ablation des cristallins. 

 

La douleur chez l’enfant

En ce temps-là, les chirurgiens pensaient que les enfants en bas âge ne sentaient pas la douleur, c’est pour cela que ma première opération de l’œil a débuté à vif. Je criais tellement fort que le toubib, pourtant réputé, a demandé que l’on me boucle le bec, et j’ai eu droit à un endormissement au chloroforme. Pas drôle.

 

Décollement de la rétine

En 1958, suite à un coup sur la tête, j’ai eu un décollement définitif de la rétine de l’œil droit.

 

Revenons au sujet de ce jour

Prendre son temps pour devenir implanté.

Au départ j’entendais normalement puisque je jouais du piano, j’étais assez bon en dictée musicale.

 

La montagne

A mon avis, tout a commencé sans que j’en prenne conscience le 13 juillet 1981 lorsque je suis arrivé au sommet du Mont Blanc à 4809 m d'altitude. Je pense que le manque d’oxygène en est la cause car dès que j’ai atteint les 3900 m, j’ai eu des maux de tête, le mal des montagnes. Pourtant, j’étais très entraîné à la marche à pied sur glacier, à l’escalade et à l’altitude. C’est une hypothèse toute personnelle, sans confirmation médicale.

 

Naissance des acouphènes

Vers 1983, j’entendis des chuintements, des sifflements inconnus et continus à gauche surtout la nuit et dans le silence.

 

Travail

À cette époque, j’avais deux professions :

-téléphoniste en 3-8 à la SNCF et

-technicien-régisseur son à la salle des fêtes de Maisons Laffitte (78).

 

Découverte d’une défaillance auditive

En 1992, mon employeur, la  SNCF, a fait réaliser à tous les agents des standards téléphoniques un audiogramme sommaire qui détecta que mon oreille gauche était plus faible que l’autre. Analyse du praticien : cela est normal à votre âge (55 ans) !

 

Prothèses

On me conseille alors d’aller voir un audioprothésiste, ce que je fis. Et me voilà affublé d’un intra-auriculaire, genre de bouchon amplificateur, avec un mini-micro, un amplificateur et un écouteur tout près du tympan, le tout alimenté par une pile encastrée dans la prothèse.

Depuis 1993, je porte des prothèses auditives de plus en plus puissantes, de l’intra-auriculaire aux contours d’oreille. Je devais changer de prothèses tous les quatre ans. Plus la prothèse est puissante, plus la pile se vide vite.

 

Le travail de régisseur son

En l’an 1998, j’ai demandé un audiogramme plus précis car j’avais des difficultés à travailler en régie. En effet, pour régler les amplificateurs de son de la salle des fêtes, il fallait que je me retourne pour apprécier l’équilibre des deux canaux stéréophoniques, les informations des vumètres de la table de mixage son ne correspondant plus avec ce que j’entendais. J’ai dû quitter ce travail qui me plaisait.

 

Vertiges

Suite à des vertiges, le médecin l’ORL de la SNCF m’envoie en urgence au service ORL de l’hôpital Beaujon à Clichy (92), examen complet du cerveau (oui j’en ai un) et des deux oreilles car l'oreille droite jalouse que l’on s’occupe un peu de trop de sa copine n’a pas tardé à suivre le mouvement de dégradation. Hospitalisation : 15 jours en surveillance.

 

Vertige de Ménière

En 2003, mon ORL détecte des vertiges de Ménière avec tous les inconvénients que cela comporte. Second stage de 15 jours à Beaujon, même punition.

Les vertiges ou maladie de Ménière sont similaires à ceux que nous subissons sur un bateau en pleine tempête (perte d’équilibre, vomissements, tête qui tourne). Cela est dû à un désaccord entre les yeux et les oreilles qui régissent notre équilibre. Depuis la sortie de l’hôpital et pendant plus de 10 ans, une fois par semaine, j’allais à Colombes (92) voir un kiné spécialisé pour  ce genre de vertiges.

 

Autres systèmes de prothèses

Une prothèse auditive n’est qu’un amplificateur de son bourré d’électronique et informatisé. Deux microphones, un amplificateur, une trappe pour la pile et un tube creux qui conduit les sons de l’écouteur à un embout que l’on place dans le conduit de l’oreille.

 

Fin des prothèses

Octobre 2013, les prothèses classiques étant à renouveler car devenues trop faibles, je me dirige chez mon audio-prothésiste préféré. Je suis de nouveau appareillé correctement, j’en profite pour aller au cinéma, magnifique, j’entends même le son en stéréophonie : victoire !

 

La catastrophe

8 jours plus tard, baisse presque totale de la compréhension et augmentation bilatérale des bruits ambiants, insupportables. Il faut bien distinguer entendre et comprendre. Entendre des bruits. Comprendre ce que l’on vous dit.

 

Que faire ?

Je me dirige vers la fondation Rothschild, près des buttes Chaumont à Paris 20ème (où l’on traite l’ensemble des pathologies de la tête). Là, je suis déjà suivi pour les yeux. L’ORL de service me conseille d’aller à l’hôpital du même nom mais dans le 12ème arrondissement. A ce moment-là, le moral est à zéro, des idées morbides me traversent, je ne dors presque plus. Ce qui me tient, c’est la lecture avec ma loupe.

Le 30 décembre 2013, je suis reçu par le Dr Christine Poncet-Wallet, elle me rassure et me fait suivre le protocole pour savoir si je suis apte à une première implantation d’électrodes dans la cochlée gauche. L’espoir revient le 21 mars 2014 lorsque Dr Yves Ormezzano m’annonce que, suite aux résultats des examens que j’ai subis, IRM et scanner, psychologue et psychiatre, audiogramme et vertiges, et j’en oublie, je serai implanté le 23 mai 2014.

Commencent 63 jours d’attente interminable, le moral remonte car il y a de l’espoir et tous les examens font passer le temps plus vite.

Je passe sur l’intervention, je dormais...

Un mois après l’implantation, le docteur Ormezzano branche le processeur externe, en mettant un bouchon dans l’oreille droite, et làmiracle, je comprends ce qu’il me dit.

Les mauvais quarts d’heures sont derrière moi.

Les séances d’orthophonie se succèdent. Un vrai miracle. Mais l’oreille droite est toujours perturbée par tous les bruits environnants.

 

Seconde intervention

Le 30 avril 2016, j’ai subi la seconde intervention. En me réveillant à la sortie du bloc, je vis ma première heure d’homme sourd. Là tout change, j’ai compris ce que c’était que d’être isolé, la communication est difficile. Étant très malvoyant, la lecture labiale ainsi que la langue des signes ne pourront pas m’aider. En arrivant dans la chambre, j’ai tout de suite branché le processeur gauche.

 

L’hôpital

Rien à redire sur le personnel soignant, ces professionnels sont à la hauteur de la situation.

 

Processeur droit

Ma première surprise fut lorsque j’ai été branché à droite, je ne reconnaissais plus les voix des personnes, moi-même j’avais changé de timbre (plus grave), l’impression de parler dans une sonorisation (genre gare SNCF des années 50), mais avec le temps et les séances d’orthophonie, les choses se sont modifiées. Mon cerveau, toujours lui, a pu analyser la situation et a retrouvé mes anciennes sensations auditives.

 

La famille

Mon orthophoniste, (Nathalie), a expliqué à mon épouse qu’il y aurait des modifications importantes dans la manière d’entendre, d’écouter et de se comprendre. Les proches des implantés rencontrent des difficultés notables, mon épouse a été et est toujours patiente.

 

Reconnaître

Mon gros problème, je n’ai qu’un dixième de visibilité de l’œil gauche. Avant la perte d’audition, je ne pouvais pas mettre un nom sur un visage, maintenant je peux mettre un nom sur une voix, ce qui me procure des ennuis avec certains interlocuteurs, il me faut expliquer sans cesse mon problème et ses causes.

Je supporte bien, le moment où je dois le soir poser les  processeurs. La surdité totale. Non, en fait, car j’ai toujours les acouphènes, moins forts qu’avant les implantations, un bruit, un tout petit bruit continu et cela me rassure, j’existe.

 

Le CRIC

Pour ma renaissance, je tiens à remercier toute l’équipe médicale du Professeur Bruno Frachet et du Docteur Christine Poncet-Wallet ainsi que les orthophonistes pour leur patience sans faille.

Je comprends mes interlocuteurs de mieux en mieux surtout les voix féminines, elles ont toutes le même son, ce qui me permet de me tromper de femme. «Il y a des envieux». Les voix masculines sont trop graves et difficiles à comprendre, mais ça vient.

Si mon interlocuteur n’attire pas mon attention, je ne comprends pas la première syllabe ou le premier mot de la phrase.

 

Activités

J’ai repris toutes mes activités sociales, associatives et surtout mon engagement pour l’accessibilité pour tous et tous les handicaps. La surdité est un handicap invisible et de ce fait mal connu et mal pris en compte.

 

Sourds muets

Je sors un petit peu du sujet pour conclure.

Au début des années 2000 et pendant près de 5 ans, j’ai montré à de jeunes sourds-muets, analphabètes, entre 20 et 30 ans, comment suivre un itinéraire dans les transports en commun. Ils venaient de l’ESAT (Clair Logis), un centre d’aide par le travail (restauration et jardinage). L’internat est situé à Oucques près de Blois (41). Le week-end, ils venaient voir leurs familles en région parisienne. Ces jeunes arrivaient le vendredi soir à la gare de Paris Austerlitz vers 17h30. Mon rôle de bénévole était de leur apprendre le chemin entre cette gare et leur domicile, et le dimanche soir le retour. Cette expérience de trois doubles séances par apprentissage, était très enrichissante. J’ai pu constater que, dans la rue et les transports, ces personnes analphabètes et un mal voyant ont les mêmes problèmes. Le déficient visuel ne voie pas les pancartes, les illettrés ne peuvent pas les lire. Il nous reste les repères physiques et géographiques : par exemple dans le métro, il n’y a pas deux stations identiques.

 

                     

  Lucien Groux

membre du Conseil d'Administration

de l'AIFIC